home > Films > Chien blanc (2022)
Chien blanc (2022)
de Anaïs Barbeau-Lavalette
publié le mercredi 22 mai 2024

par Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma en ligne directe

Sélection officielle du Love International Film Festival de Mons 2023

Sortie le mercredi 22 mai 2024


 


C’est la réalisatrice québécoise Anaïs Barbeau-Lavalette, auteure entre autres, parmi une dizaine de longs métrages, de La Déesse des Mouches à feu (2020) (1) et de Inch’Allah (2013), qui s’attaque au beau roman de Romain Gary (2) en le respectant le plus possible, y compris dans son aspect dérangeant. "Dérangeant, comme elle le reconnaît, parce qu’il ne donne aucune réponse, mais tente plutôt d’éclairer les zones d’ombre où rien n’est ni noir ni blanc, et où on avance en funambule sur le fil ténu de la morale".


 


 

Co-écrit avec Valérie Beaugrand-Champagne, le scénario a été lu par Denis Villeneuve, le maestro du cinéma québécois, crédité comme conseiller sur le film. Il faut une dizaine de minutes pour s’habituer aux visages des acteurs qui incarnent les deux protagonistes qui ne sont ni vraiment ressemblants, ni assez névrosés ainsi que nous imaginions le couple Romain Gary / Jean Seberg, réputés pour leur vie tumultueuse emplie de jalousie et d’excès en tous genres qui se conclura par des suicides. Denis Ménochet, excellent acteur, ne ressemble pas du tout à l’écrivain, mais il finit par nous convaincre. On a plus de mal avec Kacey Rohl, actrice canadienne qui, bien que blonde et menue, ne parvient à s’imposer que vers la fin du film. Mais puisqu’il ne s’agit pas d’un biopic, on finit par entrer dans le cœur du film qui se déroule au moment de l’assassinat de Martin Luther King aux États-Unis. Romain Gary est alors consul de France à Los Angeles où il vit avec Jean Seberg et leur fils Diego.


 


 


 

C’est la description d’un quotidien presque banal, jusqu’à l’arrivée inopinée d’un chien très affectueux qui s’avère avoir été dressé pour attaquer les Noirs. Jean veut le faire piquer, elle qui milite chez les Blacks Panthers, et Romain veut le sauver car on ne peut tuer tous les racistes, d’autant que ce chien n’y est pour rien. "Une vie c’est une vie ! En quoi sa vie est-elle moins importante que la tienne ?", lui assène-t-il.


 


 

Tout le film repose sur ce récit qui, loin d’être anecdotique, pose la question du racisme - et en filigrane celle du militantisme - et reste très actuel, à un moment où l’Amérique a vu se lever le mouvement Black Lives Matter. Le livre et le film mettent à jour, non la relation passionnelle et destructrice entre deux êtres qui s’aiment, mais leur position par rapport à la lutte contre le racisme. Ce que la réalisatrice résume par ces mots : "Chien blanc aborde un chapitre d’une grande histoire d’amour. Mais avant tout, il pose cette question éminemment moderne : est-il possible de prendre part à une lutte qui ne nous appartient pas ? Est-ce même souhaitable ? Et si oui, de quelle façon ? À quel prix ?"

Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma en ligne directe

1. La Déesse des Mouches à feu Jeune Cinéma en ligne directe.

2. Samuel Fuller avait déjà adapté le roman de Romain Gary, en 1982, sous le titre White Dog, avec pour titre français Dressé pour tuer.


Chien blanc. Réal : Anaïs Barbeau-Lavalette ; sc : A.B.-L. & Valérie Beaugrand-Champagne, d’après Romain Gary ; ph : Jonathan Decoste ; mont : Richard Corneau ; mu : Mathieu Charbonneau, Ralph Joseph Waahli, Christophe Lamarche Ledoux, Maxime Veilleux. Int : Denis Ménochet, Kacey Rohl, K.C. Collins, Peter James Bryant (Canada, 2022, 96 mn).



Revue Jeune Cinéma - Mentions Légales et Contacts