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Calet, Henri (1904-1956)
Brève
publié le vendredi 28 août 2015

Jeune Cinéma en ligne directe.

Journal de Old Gringo 2015 (vendredi 28 août 2015.)

À propos de Henri Calet et de la librairie du 11 rue Barrault, Paris 13e.


 


Vendredi 28 août 2015

 

Henri Calet (1904-1956) était un auteur oublié.

Plan insert : "35 ans auparavant".
Comme on fait dans les films aujourd’hui, quand on ne sait pas bien comment raconter le temps en images.

Dans les années 1970, il y a avait une minuscule librairie, nichée dans une encoignure de la rue Barrault (13e), en face de chez nous.

Anarchiste, la librairie de la Butte-aux-Cailles, et vraiment minuscule.

Mais avec une arrière-boutique pleine de revues souterraines, de brochures improbables et autres littératures grises de marge, tout ce qu’on ne trouvait nulle part ailleurs.
Donc c’était connu et fréquenté que par des happy few, avec un entre–soi de bon aloi, tournicotant autour de Victor Serge, Karl Korsch ou les Cahiers du Cendocri (1980-1981).

Il nous faudrait fouiller dans nos vieilles photos pour retrouver l’image du souvenir : cet endroit mythique désormais, avec ses livres d’occase à l’extérieur.

C’est devenu bien propre, aujourd’hui.


 

Dans notre souvenir, la librairie était tenue par Dominique Gaultier et Guy Ponsard. Il y avait aussi Anne-Marie Adda.
Plein d’autres aussi, quand on consulte le Net d’aujourd’hui.

Quand ils décidèrent de se lancer dans l’édition, nous n’en avions pas été surpris : la littérature était là, sans doute avant la politique.

Ils commencèrent par faire une revue, Les Grandes Largeurs (12 numéros, 1981-1987), et ils appelèrent la maison d’édition "Le Tout sur le Tout".

Vous l’avez compris : Henri Calet, enfant du 14e arrondissement et flâneur de Paris, était leur ange initiateur.

Ils rééditèrent aussi Paul Gadenne, Raymond Guérin Georges Henein, Pierre Herbart, Yves Martin, Emmanuel Bove...

Il y a eu des scissions et des migrations.

Au début des années 80, Dominique Gaultier fonda les Éditions Le Dilettante.

La librairie-éditions s’est agrandie et a déménagé, d’abord toujours dans le 13e, rue du Champ-de-l’Alouette. Et puis elle a fini par atteindre le quartier réservé : rue Racine, et désormais place de l’Odéon. Vous connaissez la suite.

Mais on voulait parler de Henri Calet, qui resurgit aujourd’hui avec Huit quartiers de roture, (Éd. Dilettante).


 

On a lu tout Calet, à l’époque - enfin tout ce qui paraissait, comme on lisait d’ailleurs, Léo Malet. C’était le tournant des années 80, ce temps où "ça" n’avait pas encore basculé, où Paris le vieux nous appartenait encore.

On pouvait chanter comme Reggiani, les soirs de nostalgie et d’abus de slivovitz.
Mais au fond, on y croyait encore, à l’ancienne manière.


 

Rétrospectivement, d’ailleurs, on peut s’amuser de ce que ces grands modernes qu’étaient les soixante-huitards aient cherché leurs racines et leurs référents dans le passé, écumant les brocantes et les textes inédits.
Aujourd’hui, les jeunes, qui ne savent généralement pas grand chose de l’histoire, ne désirent rien tant que la vraie table rase. Passons.

On ne sait plus dans lequel de ses livres, Calet disait combien il était heureux de vivre dans le 14e arrondissement, parce qu’on y trouvait tout ce dont on avait besoin dans une vie : une maternité, des hôpitaux, un asile d’aliénés, un prison, un cimetière.
Et puis, il disait aussi qu’il en avait marre d’être vieux, car il ne pouvait plus rien découvrir : l’amour, la mort, le voyage, tout était déjà fait.

Il avait tort.
Il avait négligé toutes ces vies posthumes et tous ses petits-enfants, ceux qui veulent bien encore apprendre de lui ce qui a précédé le Paris d’aujourd’hui.

Là où il est, à Vence, au soleil, il doit se réjouir.

JC en ligne directe (août 2015)



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