Jeune Cinéma n°382-383 - automne 2017
Édito et sommaire
publié le samedi 30 septembre 2017

JEUNE CINÉMA n°382-383, automne 2017.


 

Couverture :
Karl Marx et Friedrich Engels, Marx-Engels-Forum, Berlin ©Jeune Cinéma

Quatrième de couverture : Louise Brooks. Pour le plaisir des amateurs XXXIV

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ÉDITO JEUNE CINÉMA n° 382-383, automne 2017

 

Marx, le retour.
Ou plutôt retour à Marx et aux fondamentaux.
Ce qui n’est pas vraiment tendance, en nos temps d’économie néolibérale 2.0. Invoquer le spectre du vieux barbu ferait rire dans les lieux où s’élaborent et s’affinent les techniques actuelles de répartition des flux de la marchandise - pourquoi pas Charles Fourier ou les saint-simoniens ?

Mais ladite marchandise n’est pas encore devenue totalement virtuelle et réfléchir sur sa valeur d’échange et sa valeur d’usage n’est pas inutile, ne serait-ce que pour savoir à quelle sauce nous sommes accommodés.

Jean Delmas - honneur à notre père-fondateur - commençait ses cours d’histoire, en Terminale, par une interrogation : "Le marxisme est-il une vision du monde ou une méthode ?"
Alors qu’il appartenait à une génération pour laquelle la première hypothèse s’imposait, il nous persuadait que seule la seconde nous offrirait les clés d’une analyse, même partielle, du réel.
Cela se passait en des temps très anciens, au moment où Althusser puis Debord rouvraient Le Capital pour en vérifier les rouages.

Raoul Peck, en présentant son Jeune Karl Marx, ne cherche pas autre chose : "Il faut impérativement revenir à des instruments qui nous permettent de comprendre notre époque. Et ces instruments-là, on les trouve chez Marx."

Son film n’est pas une leçon de didactisme à l’usage des masses à convaincre, simplement une recréation, fouillée dans le détail et exacte dans son déroulement, des années de formation de son héros - et de Friedrich Engels, son compère.

Le Jeune Karl Marx n’est pas parfait, mais c’est un film important, à la fois humble (il ne donne pas de leçons) et ambitieux (il porte hautement et justement témoignage). Incommensurablement plus excitant pour l’esprit que les émois rappeux d’une petite bergère qui croit devoir sauver la France. (1)

Nous avions annoncé, dans le dernier numéro, vouloir revenir sur Barbara. Mais le film de Mathieu Amalric a été si largement soutenu et accueilli (par la critique et le public) qu’il n’y avait nul besoin d’en rajouter dans l’exégèse.

Quant à Faute d’amour de Andréi Zviaguintsev, on persiste à le considérer comme la vraie Palme cannoise, nouvelle brique dans la construction d’une œuvre sans guère d’équivalent (sinon celle de Roy Andersson) dans le cinéma d’aujourd’hui.

Après l’accalmie estivale, le rythme implacable des sorties hebdomadaires a repris.

Outre les films couverts par notre sélection Actualités, prière de ne pas rater la réédition prochaine de Samedi soir, dimanche matin, de Karel Reisz, qui vient compléter celle, récente, de La Solitude du coureur de fond de Tony Richardson - deux chefs-d’œuvre qui n’ont rien perdu de leur force après cinq décennies. Cf. Le Free cinema vu par un Italien.

Et puisque nous sommes au chapitre anglais, nous reviendrons bientôt sur l’œuvre de Alan Clarke, très grand cinéaste méconnu, dont le BFI vient d’éditer un coffret DVD d’une quarantaine de films réalisés pour la BBC.

Deux centenaires vont être célébrés cet automne, sans aucun rapport entre eux : celui de Henri-Georges Clouzot et celui de la révolution soviétique.

L’auteur du Corbeau sera l’objet, dans l’ordre chronologique, d’une rétrospective presque complète au Festival lyonnais Lumière (du 14 au 22 octobre 2017), puis d’une rétro, pas totalement complète non plus, à la Cinémathèque française (du 8 au 22 novembre 2017), doublée d’une exposition plus durable. Une des sections de celle-ci s’intitulera "Filmer le geste (Picasso et Karajan)" : l’article de Philippe Roger, page 42, fait précisément le point, sans fard, sur cet aspect de l’œuvre du maître.

L’examen du cinéma soviétique s’effectuera également dans deux espaces : d’abord à la Fondation Jérôme Seydoux-Pathé, à partir du 28 septembre 2017 - uniquement les films muets, selon sa vocation -, ensuite à la Cinémathèque (films de 1917 à 1945), entre le 18 octobre et le 26 novembre 2017.
D’un programme à l’autre, on découvrira quelques raretés, signées Koulechov ou Barnet, certaines autres déjà vues en 2002 lors du cycle consacré au Dégel par le Centre Pompidou (attention aux films de Alexandre Matcheret et de Abram Room). Et revoir en copie neuve, dans un lieu ou l’autre, Aerograd de Dovjenko ou La Grève de Eisenstein ne peut jamais faire de mal.

Faute de s’intéresser désormais aux Rencontres Cinéma italien d’Annecy, dont la nouvelle orientation, après tant d’années de satisfaction, est navrante, les émissaires de Jeune Cinéma couvriront, durant les prochains mois, les festivals de San Sebastian, Dinard, Pordenone (avec un film de Louise Brooks retrouvé, Now We’re in the Air, 1927 !) et Lyon, à l’ombre de Wong Kar-wai. Toutes choses plaisantes dont il sera rendu compte d’ici 2018.

Les articles annoncés dans l’édito du n° 381 - le bilan de la vague 2017 de premiers films dans le cinéma français et la recension de l’ouvrage de Jean-Jacques Meusy, Les Écrans du cinéma français - sont repoussés au prochain numéro.
Le premier pour des raisons d’espace : comment glisser un long texte supplémentaire dans un numéro chargé jusqu’à la gueule (les abonnés fidèles auront remarqué que celui-ci comprend dix pages de plus que les n° doubles les plus emplis).
Le second parce que sa lecture en est si prenante qu’on la savoure et qu’on aimerait que ces 612 pages n’aient pas de fin.

Cette livraison voit le début de deux chroniques à épisodes : celle de Robert Grélier sur la fort précieuse collection "Phares", dont les DVD établissent un panthéon des peintres et écrivains surréalistes, des plus aux moins célèbres, et celle de Vincent Pinel, qui a ouvert pour Jeune Cinéma sa boîte à curiosités oubliées, revisitant en dix étapes quelques énigmes plus que centenaires.

Un numéro qui va de Raoul Peck à Louis-Aimé-Augustin Le Prince, via Clouzot, Schlesinger, le surréalisme, Garrel et Védrès, quelle bonne lecture automnale…

Lucien Logette
Jeune Cinéma n°382-383, automne 2017

1. Nous ne supportons ni le mythe national de Jeanne d’Arc, ni la poésie de Charles Péguy, c’est dire. Mais René Prédal développe, page 22, une autre analyse, tout autant défendable, de la Jeannette de Bruno Dumont.
Quant au public, il a déjà fait son choix.

P.S. Nous apprenons à l’instant la disparition de Jean-Pierre Jeancolas, collaborateur de la première heure de Jeune Cinéma, puisqu’il y écrivit (presque) dès l’ouverture, du n° 7 (mai 1965) jusqu’au n° 87 (mai-juin 1975), avant de passer à Positif. Historien du cinéma français - son Quinze ans d’années trente (Stock, 1983) reste un des ouvrages les plus remarquables sur la période -, spécialiste du cinéma hongrois, il présida, entre 1992 et 1996, l’Afrhc (Association française de recherche sur l’histoire du cinéma), dont il était un des fondateurs. Nous reviendrons plus longuement sur lui dans le prochain numéro de la revue.



SOMMAIRE JC n°382-383, automne 2017

 

Cinéma français
 

* Retour dans le labyrinthe des Fantômes d’Ismaël, par René Prédal.

* Le Jeune Karl Marx, par Sylvie Strobel, Anne Vignaux-Laurent & Lucien Logette.

* Jeannette, par René Prédal.

Du monde entier
 

* Black, brown and white, par Bernard Nave.

* Cinéma espagnol "différent", par Marceau Aidan.

Festivals
 

* La Rochelle 2017, par Philippe Rousseau.

* Le Miroir de Tarkovski à La Rochelle, par Philippe Morier-Genoud.

Patrimoine
 

Henri-Georges Clouzot

* Clouzot à l’épreuve de l’art, par Philippe Roger.

* Clouzot, l’œuvre fantôme, par Lucien Logette.

* Manon, par Lucien Logette.

* De la judéité de quelques "exilés"européens à Hollywood II, par Patrick Saffar.

* Bunuel sans tilde, par Philippe Roger.

* Nicole Védrès, par Lucien Logette.

Grandes et petites énigmes de l’histoire du cinéma muet I par Vincent Pinel.

* La disparition de Le Prince.

* La première séance et Jean Acme LeRoy.

* Inferno 10 : Philippe Garrel, par Jean-Paul Combe & Vincent Heristch.

DVD
 

* Loin de la foule déchaînée, par Jérôme Fabre.

* Sur quelques films italiens méconnus, par Lucien Logette.

* Glanures : de Percy Smith à Mograbi par Philippe Roger.

* Luiz Bolognesi, Rio 2096, une histoire d’amour et de furie, par Robert Grélier.

* I colori ritrovati- Kinemacolor e altre magie, par Lucien Logette.

Cinéma et Littérature
 

* Toute la mémoire du surréalisme I (sur la collection Phares), par Robert Grélier.

* Quelques films de André Breton (1921-1928), par Lucien Logette.

Actualités
 

* Jeune femme, par Nicole Gabriel

* Taxi Sofia, par Gisèle Breteau Skira.

* Espèces menacées, par Gisèle Breteau Skira.

* Confident royal, par Nicole Gabriel.

* Home, par Jean-Max Méjean.

* Gauguin - Voyage de Tahiti, par Gisèle Breteau Skira.

* Des lois et des hommes, par Nicole Gabriel.

* En attendant les hirondelles, par Gisèle Breteau Skira.

* Carré 35, par Thomas Coster.

* Deux hommes en fuite, par Nicole Gabriel.

Livres
 

* L’Autobiographie dilatée. Entretiens avec Nanni Moretti de Jean Gili, par Lucien Logette.

* Éditer Prévert. Lettres et archives éditoriales (1946-1973), par Robert Grélier.

* Jeanne Moreau, le tourbillon d’une vie de Marianne Gray, par Nicolas Villodre.

Souvenirs
 

* Claude Autant-Lara 1952, par Bernard Chardère.

Nécrologie
 

* Gérard Gozlan (1935-2017), par Robert Grélier.

* Isabelle Sadoyan, par Bernard Chardère.

* Pour Isabelle Sadoyan, par Philippe Morier-Genoud.

JEUNE CINÉMA n°382-383, automne 2017.



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