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Paul s’en va (2003)
de Alain Tanner
publié le mercredi 12 octobre 2022

par Andrée Tournès
Jeune Cinéma n°287, janvier 2004

Sortie le mercredi 28 janvier 2004


 


Paul s’en va est un film testament.
L’histoire - réduite à l’essentiel - est celle d’un départ, sans doute définitif. À l’inverse de Charles mort ou vif ou de La Salamandre, (1) le disparu a voulu transmettre des tâches à ceux qu’il abandonne, les "élèves citoyens" - tels les définit Alain Tanner - d’un cours d’art dramatique, une manière à lui de se les attacher.


 

De Paul, nous entrevoyons seulement un homme d’une autre génération, au profil aigu, qui s’esquive. Et commence le vrai parcours du film, scandé par des dates, en juin. On y suit les réactions du groupe à l’absence-présence de Paul, un maître, un ami, un manipulateur, c’est selon.


 

Des mini-scènes montrent l’exécution des tâches imparties à tel ou telle. Remplir un caddy de supermarché et éliminer l’inutile, chercher le disparu dans les hôpitaux et postes de police, épouser (sic) la rivière. C’est l’élément divertissant du film.

Le second élément, mais superposé et non-narratif, est fait de citations qui émanent du cinéaste et non de son personnage - Aimé Césaire, Arthur Rimbaud, Louis-Ferdinand Céline, Antonin Artaud, etc. Elles ont accompagné une autre génération, mais elles sont portées, récitées, transfigurées par la beauté, le naturel, la fraîcheur de jeunes visages, les sourires, le plaisir.


 

Et les effets de miroir se multiplient avec ces personnages d’actrices jouées par des actrices de Genève. Il y a les garçons, mais on est surtout touché par les filles. Outre le plaisir devenu rare dans une salle de cinéma, d’entendre la série des "anti" et celle des "pour" pimentées de quelques poings levés, il y a l’émotion de voir se constituer un groupe.


 

On ajouterait volontiers quelques vers du chanteur italien Giorgio Gaber, tirés de son dernier disque, "Ma génération a perdu".
Ils s’intitulent Appartenance  :
Ce n’est pas "le sentiment civique d’être ensemble
Ni une agrégation due au hasard,
C’est sentir les autres en soi...
Je serais capable de changer ma vie
Si on pouvait commencer enfin à dire NOUS.

Andrée Tournès
Jeune Cinéma n°287, janvier 2004

1. "Charles mort ou vif" (1969), Jeune Cinéma n°42, novembre-décembre 1969 ; "La Salamandre" (1971), Jeune Cinéma n°58, novembre 1971 ; "La Salamandre, rebond", Jeune Cinéma n°287, janvier 2004.


Paul s’en va. Réal : Alain Tanner ; sc : A.T. & Bernard Comment ; ph : Denis Jutzeler ; mont : Max Karli ; mu : Michel Wintsch ; cost : Carole Favre. Int : Madeleine Piguet, Julien Tsongas, Lucie Zelger, Pauline Le Comte, Julia Batinova, Nathalie Dubey, Guillaume Prin, Anna Pieri (France-Suisse, 2003, 85 mn).



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