ÉDITO 2025

Jeune Cinéma a fêté ses 60 ans au Salon de la revue, en septembre 2024. Elle a survécu, elle est bien vivante. Malgré le temps qui passe et les amis qui disparaissent, le nombre d’abonnés reste stable, les anciens sont remplacés par des jeunes, et de nouveaux rédacteurs, bénévoles, se proposent régulièrement. Son site, gratuit, qui dépend de la revue papier, mais propose également des textes inédits, qui a fêté ses 10 ans, est très fréquenté. C’est une fierté.
Mais les deux versions survivent "pour l’instant". Bien des dangers les guettent dans ce monde troublé, en transition, qui nous entoure.

Les années passent, et les éditos du site s’enchaînent et se ressemblent, à la recherche d’une perspective de plus en plus improbable. Le sentiment de déclin des civilisations terriennes s’intensifie, et, paradoxalement, s’assoupit. Le spectacle du monde, filtré par les écrans, ne provoque plus d’émotions, ni terreur ni pitié. Face à la tragédie, au sang, aux larmes, nulle catharsis n’est plus même imaginable. Le nez dans leurs machines, ou les armes à la main au cœur de la mêlée, les humains s’éparpillent, sans foi, sans loi, ou dans des cultures contre nature.

Le 1er janvier 2024, on avait déjà fait un triste bilan, et décidé quand même d’avoir confiance dans la jeunesse en résistance. Mais on ne perçoit, pour l’instant, aucune tendance à une amélioration, au contraire. L’année 2024 aura été la plus chaude jamais connue et les catastrophes climatiques se sont multipliées partout dans le monde, alors que le climatoscepticisme revient en force. Les conflits se sont réveillés, les vieilles guerres se sont enlisées, de nouvelles se préparent. Les démocraties sont en crise. Et l’impuissance des organisations internationales est criante.

En 2025, il est difficile de continuer à faire des déclarations toniques. Mais il nous faut aimer notre époque, nous n’avons qu’elle.
Nous avons confié le Journal 2025 du site à Pierre Vernant, un grand chercheur spécialiste reconnu de biologie marine. Il a choisi de se retirer du monde. Il dit : "Je ne veux pas faire partie de ce monde-là. Il faut toujours aller plus vite. Je veux avoir le temps de penser. Je ne veux pas que quiconque décide à ma place de ma manière d’utiliser ce que j’ai de plus précieux et de plus éphémère, mon temps de vie". Il sera notre refuge, notre échappée de la caverne et notre fuite des ombres, si 2025 tourne mal.

Anne Vignaux-Laurent
Jeune Cinéma en ligne directe
 

* Les Choses simples de Éric Besnard (2023).

Pierre Vernant : Grégory Gadebois.
Vincent Belcourt : Lambert Wilson.

Au fil du temps, tous les éditos
 

Voyage dans le temps.