* Ma’Joad (édito) * Janvier 2014 * Février 2014 * Mars 2014 * Avril 2014 * Mai 2014 * Juin 2014 * Juillet 2014 * Août 2014 * Septembre 2014 * Octobre 2014 * Novembre 2014 * Décembre 2014
Daniel Boulanger (1922-2014) est mort le 27 octobre 2014.
Sa disparition a été annoncée hier par les gazettes, et c’est la première fois depuis bien longtemps que son nom y apparaissait.
Il faut dire que ce stakhanoviste de la plume - en cinquante ans, vingt recueils de nouvelles, vingt-cinq romans, huit pièces de théâtre, trente-cinq recueils de poèmes, vingt-sept scénarios - ne publiait, depuis le début de ce siècle, que des poésies, ouvrages qui ornent rarement les vitrines de libraires ou les pages littéraires des quotidiens.
Côté cinéma, il avait commencé fort, puisque, la seule année 1960, il montra sa trogne typée, corps massif, crâne en boule de billard, dans À bout de souffle et Tirez sur le pianiste, et scénarisa trois films, La Récréation de François Moreuil (1961), Les Jeux de l’amour de Philippe de Broca (1960) et Le Bal des espions de Michel Clément (1960).
Fantaisie et élégance étaient déjà sa marque et les dix titres qu’il écrivit ensuite pour Philippe de Broca constituent, pour l’un et l’autre, le meilleur de leur filmographie : Le Farceur (1960), L’Amant de cinq jours (1961), Cartouche (1962), L’Homme de Rio (1964), Le Diable par la queue (1968) n’ont rien perdu de leur entrain. On conserve surtout un souvenir ébloui du Roi de cœur (1966) et des Caprices de Marie (1969), de loin leurs deux meilleurs films et leurs plus attachants - en même temps deux échecs publics, ceci expliquant cela.
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Philippe de Broca, mais pas seulement : Jean-Paul Rappeneau pour La Vie de château (1966), Claude Chabrol pour Marie-Chantal contre le docteur Kha (1965), Louis Malle pour Le Voleur (1967), et pour son sketch du film collectif Histoires extraordinaires, William Wilson, dont il signa les dialogues, ont su profiter de son inventivité et de l’efficacité de ses dialogues. Même Bernard Borderie fit appel à lui pour sa série des Angélique…
La suite fut moins réussie : les univers de Christian-Jaque, Jean Delannoy ou Roger Vadim n’étaient pas les sien, ni même celui de Alain Corneau pour Police Python 357 (1976) ou La Menace (1977). Philippe de Broca fit appel à lui de nouveau en 1988 pour Chouans ! (1988) - mais était-ce bien la peine ?
Il était un styliste pointu, et c’est dans les nouvelles qu’il excellait. S’il n’y avait qu’un seul titre à indiquer, ce serait Le Chemin des caracoles (Laffont, 1966).
À partir de ce soir, et jusqu’à samedi 1er novembre 2014, à 19h, Jorge Cedrón El Tigre est au Lucernaire, grâce à l’Institut National du cinéma et des arts audiovisuels (INCAA), à l’Ambassade d’Argentine en France et l’associations "Espagnolas en Paris".
En 1980, le cinéaste argentin Jorge Cedrón était assassiné à Paris dans des circonstances non élucidées à nos jours. Il avait osé défier la censure de son pays.
À 38 ans, il a laissé une poignée de films éparpillés que sa fille Lucía, cinéaste elle-même (Agnus Dei), a mis des années à réunir. Restaurée avec le concours de l’INCAA, l’œuvre de Jorge Cedrón sort enfin de la clandestinité. Ces films seront montrés pour la première fois dans la salle de quartier où lui-même faisait découvrir le cinéma à sa petite fille..., à deux pas du cimetière de Montparnasse où il est enterré.
Les projections ont lieu en présence de Lucía Cedrón, Liliana Mazure et Manuel, Román, Emilio, Roberto "BIlly" Cedrón.
Les films sont restaurés avec des sous-titres français. Et l’entrée est libre dans la mesure des places disponibles. Les projections sont suivies de discussions avec le public.
Au programme :
* Jeudi 30 octobre 2014 : La vereda de enfrente (Le Trottoir d’en face) (1963) ; Gotán (1980).
* Vendredi 31 octobre 2014 : El otro oficio (L’Autre Boulot) (1967) ; Por los senderos del Libertador (Sur les sentiers du Libertador) (1971).
* Samedi 1er novembre 2014 : El habilitado (Le Supérieur) (1970).
Sur les écrans, aujourd’hui, seize nouveaux titres, trois rééditions, une "retransmission" en direct du Met de New York.
Combien en restera-t-il d’ici le 5 novembre 2014, excepté les trois blockbusters américains The Wick, The Giver et The November Man ?
Inutile de se lamenter devant un marché devenu fou, aucune raison que le flux se calme tant qu’il demeurera des spectateurs.
Que prélever cette semaine ?
Libération tente de nous faire croire sur deux longues pages que HPG est devenu, avec Fils de, un cinéaste digne d’attention. Personne n’est forcé de le croire.
Sans avoir vu Fièvres de Hicham Ayouch, on peut le conseiller, en souvenir de son déjà ancien Fissures (2006). Il est recommandé de choisir le Cinéma La Clef et le 3 novembre 2014, pour le voir dans les meilleurs conditions et rencontrer Hicham Ayouch.
Cédric Kahn revient, treize ans après Roberto Succo, à un sujet "reposant sur des faits s’étant réellement produits". Ce qui n’est pas toujours une caution.
Mais Vie sauvage, d’après la longue cavale de ce père et de ses deux fils, installés dans la clandestinité, passant d’une cabane au fond des bois à des communautés marginales accueillantes, échappant onze ans durant à toutes les recherches policières avant d’abdiquer et refaire surface dans le monde "civilisé", est tout à fait visible. Mathieu Kassovitz, cheveux et barbe déployés, est très convaincant, et Céline Sallette aussi éblouissante que d’habitude, malgré ses apparitions réduites à deux séquences. Sans atteindre l’inoubliable À bout de course de Sidney Lumet, le film vaut un détour.
Massacre à la tronçonneuse nous fera-t-il aussi peur qu’il y a quarante ans ? On en a tant vu depuis !
En tout cas, dans un autre genre, Quelques jours de la vie d’Oblomov, datant d’une époque où Nikita Mikhalkov était considéré comme un cinéaste d’avenir, mérite d’être revisité : une telle défense et illustration de l’oisiveté est un remède bienvenu.
Mais surtout, surtout : L’Aventure de Madame Muir de Joseph Mankiewicz (1947), ressorti la semaine dernière.
À Marcigny, commencent les 44e Rencontres Cinéma de Marcigny, jusqu’au dimanche 2 novembre 2014.
Dans cette une adorable petite ville de Bourgogne, au bord de la Loire, il y a un cinéma, le Vox, dont les animateurs préfèrent le 35 mm, le "support historique du cinéma". Et c’est un des événements cinéma le plus chaleureux et le plus convivial de France.
Pour cette 44e édition, une exposition d’affiches sur "La Grande Guerre" au cinéma, pour en marquer le coup du centenaire.
Les invités sont : Geneviève de Pastre, Alain Riou, Frédéric Fossaert, et Vincent Dupré (critique, collaborateur de Jeune Cinéma, programmateur de l’Action-Théâtre du Temple).
Comme chaque année, la programmation des projections est éblouissante.
Une occasion unique de retrouver ce temps authentique qui nous manque désormais, cernés que nous sommes par le fast, alors que le slow nous serait si nécessaire.
La semaine télé de Jeune Cinéma du 25 au 31 octobre 2014.
* De 17h à 20h, on fête les 50 ans de Jeune Cinéma, chez Betty Boop, à la librairie CinéReflet, rue Victor-Cousin, 75005 Paris.
CinéReflet, 15 rue Victor-Cousin, 75005 Paris.
Les sorties sur les grands écrans.
* Of Men and War de Laurent Bécue-Renard (2014).
* Le Moment et la manière de Anne Kunvari (2014).
* Lili Rose de Bruno Ballouard (2014).
* Bande de filles de Céline Sciamma (2014).
À Paris, au Centre Wallonie-Bruxelles, ce soir à 20h00, on continue à explorer Ce tant bizarre Monsieur Rops (2000), film de Thierry Zéno, en sa présence.
Monsieur Rops : Province de Namur, Belgique. Nous sommes au château de Thozée, l’ancienne demeure de Félicien Rops. Nous entrons dans son œuvre : une description féroce des mœurs du 19e, des sujets imprégnés d’érotisme et hantés par la mort. L’audace de son œuvre, sa haine de l’hypocrisie, son franc-parler, sa critique de la bourgeoisie et de la religion lui ont valu beaucoup d’inimitiés. Son talent et son esprit ont séduit de nombreux artistes et écrivains de son époque : Baudelaire, Barbey d’Aurevilly, J-K Huysmans, les frères Goncourt, Emile Zola, Guy de Maupassant, Daudet, Verlaine, Mallarmé, Manet, Rodin ou Nadar.
C’est dans le cadre de l’exposition L’Ombilic du rêve que nous vous avons annoncée dans le Journal de Ma’Joad, en date du 25 septembre 2014.
Lyon Lumière 2014
Il faut savoir terminer un festival.
Pour que cela se fasse en beauté, la projection de Furtivos, de José Luis Borau (1975), s’impose, à 9h30, à l’Institut.
C’est peut-être le dernier film espagnol sorti avant la mort de Franco, le dernier donc qui avait dû lutter pour dire ce qu’il avait à dire. Il n’a pas été souvent programmé depuis sa sortie française. Bonne occasion pour se retremper dans une époque disparue, loin de la Movida.
On enchaînera à 11h30, sans quitter sa place, avec Le Voleur de Bagdad, le premier du genre (1924), signé Raoul Walsh, un des très grands films de Douglas Fairbanks, que même la superbe version en couleurs de Michael Powell (1940) ne fait pas oublier.
À propos, on trouve un chouette commentaire du film de Walsh, sur les Fiches du cinéma, qui fêtent leurs 80 ans cette année.
Bon anniversaire !
Et longue vie à leur usuel précieux, l’ Annuel du cinéma (sur papier).
Et puisque l’on est dans la démesure, pourquoi ne pas se laisser tenter (Pathé Vaise, 14h30) par Ben Hur, la version moderne (1959) cette fois-ci, pas la muette de Fred Niblo (1925).
William Wyler n’est pas trop bien considéré par la critique pensante. Il serait temps de revenir sur ce cinéaste qui a tourné plus de films remarquables que bien d’autres. Le grand pestacle, c’est tout de même bien !
Pour les amateurs de propos plus intimes, à 17h00, à l’Institut Lumière, un petit dernier Ida Lupino, pour la route : Bigamie (1953), avec le toujours excellent Edmond O’Brien, parfait Américain moyen, incapable de choisir entre Joan Fontaine et Ida Lupino.
Rendez-vous au prochain automne : Lyon Lumière 2015.
La semaine télé de Jeune Cinéma du 18 au 24 octobre 2014
Lyon Lumière 2014
Journée un peu "classique", mais de bon, d’excellent goût, même.
En commençant, dans la grande salle Lumière, à 9h30, heure des braves, par La Ruée de Frank Capra (1932), en VO American Madness, titre beaucoup plus juste pour ce beau film sur la folie financière, un des premiers d’une longue lignée.
Et pas question de bouger, puisque suivent deux moyens métrages pas souvent sortis de leurs boîtes :
* Fièvre de Louis Delluc (1921), archétype du genre bistrot du port, matelots, Orient lointain, tous les fantasmes exotiques des années 20, à la Mac Orlan.
* Et surtout le très rare Soleil et Ombre de Musidora & Jaime de Lasuen (1922), que cette diablesse de femme alla tourner là-bas, dans l’Espagne de l’amour brûlant, des toreros corsetés et des paroxysmes (le titre d’un de ses livres).
Tiens d’ailleurs, avez-vous lu Paroxysmes ?
Parce qu’il n’y a pas qu’Irma Vep, même si elle est le point sublime de nos surréels personnels.
Pour garder l’Espagne au cœur, le CNP Terreaux présente, à 14h45, Le Bourreau (El Verdugo) de Luis Berlanga (1963), avec Nino Manfredi en croquemort mémorable amoureux de la fille de l’exécuteur. L’humour noir était une des seules manières, à l’époque, pour égarer la censure franquiste.
Et puisque nous avons fait le déplacement, la même salle offre à 17h00, le chef-d’œuvre de Andréi Tarkovski, Andreï Roublev (1966). Certes, il y a du religieux, des icônes à foison, de la métaphysique, mais ne chipotons pas.
Pour terminer sur une note plus moderne, le Pathé Bellecour s’impose, avec, à 21h45, en avant-première, Les Nouveaux Sauvages de Damian Szifron, une des découvertes les plus réjouissantes du Festival de Cannes 2014 - esprit Hara-Kiri pas mort !
Lyon Lumière 2014
Le chef-d’œuvre du jour, à ne rater sous aucun prétexte, inépuisable même si on l’a déjà vu et revu, passe au Comœdia, à 14h30. C’est L’Esprit de la ruche (1973), le premier des trois films, tous admirables, de Victor Erice.
Une des plus belles plongées jamais effectuées dans l’univers fantasmagorique enfantin - et la découverte, bien avant de la retrouver chez Carlos Saura, de Ana Torrent. Avec un seul film de ce calibre, la journée serait déjà réussie.
Ce qui n’empêche pas, auparavant, d’aller à l’Institut dès 9h30, voir Overlord de Stuart Cooper (1975), étonnant film de formation militaire qui a inspiré (et plus encore) Stanley Kubrick pour son Full-Metal Jacket. Il a été programmé à Berlin en 1975 et à Cannes classics en 2014.
On enchaînera avec profit, à 11h30, toujours dans la grande salle et sous le patronage de Bertrand Tavernier, avec Le Café du Cadran (1946), signé Jean Gehret, mais plus certainement réalisé par Henri Decoin, jolie célébration du petit monde parisien de l’immédiat après-guerre.
Puisque l’après-midi, on est au Comœdia pour le film de Victor Erice, pourquoi ne pas rester à 16h45 et savourer Django de (Sergio Corbucci (1966), première apparition du héros et sans doute la meilleure ?
Ce qui laisse le temps de rallier l’Institut, pour revoir La Vie criminelle d’Archibald de la Cruz (1955), un des films de Luis Buñuel les moins fréquentés et les plus troublants - ah, ce mannequin de cire en train de fondre !
THE CRIMINAL LIFE OF ARCHIBALDO DE LA CRUZ (Luis Buñuel, 1955) from Spectacle on Vimeo.
Et pour terminer en beauté, rien de mieux que Le Voyage de la peur (1953), le Ida Lupino du jour.
C’est sa première incursion dans le film de genre et le premier film noir dirigé par une femme, à partir d’un fait divers réel, avec William Talman, tueur psychopathe à l’œil droit jamais fermé.
Marie Dubois (1937-2014) est morte hier, le 15 octobre 2014.
Elle s’appelait Claudine Lucie Pauline Huzé, mais elle avait choisi, comme nom de scène, un nom plus basique : Marie Dubois.
En commentant sa disparition, la radio du matin la présentait comme une des égéries de la Nouvelle Vague. En réalité, excepté son rôle éminent dans Tirez sur le pianiste - qui demeure le meilleur film de François Truffaut (1960), elle ne fit, chez Rohmer ou Godard, que des apparitions.
Sa filmographie (87 films et téléfilms) s’est réellement construite avec ce que le cinéma français, ou étranger, contenait de meilleur (Robert Enrico, René Clair, Louis Malle, Michel Soutter, Luchino Visconti, Alain Resnais, Claude Sautet).
Elle ne négligeait pas le cinéma grand public (Jacques Poitrenaud, Gérard Oury, Henri Verneuil, Francis Girod), mais choisissait parfois de faire confiance à des inconnus.
On peut citer pour mémoire trois titres dans lesquels elle était éblouissante.
* Bof, anatomie d’un livreur, l’inoubliable premier film de Claude Faraldo (1971).
* Je parle d’amour, film totalement oublié (et c’est dommage) de Madeleine Hartmann-Clauset (1979).
* L’Intrus de Irène Jouannet (1984).
La maladie (une sclérose en plaques, maladie contre laquelle elle s’était engagée publiquement) avait écourté sa carrière.
On ne l’avait plus vue depuis Rien ne va plus de Claude Chabrol (1997), titre prémonitoire.
Lyon Lumière 2014
Les spectateurs conquis par les quatre premiers titres de la "saga Miyamoto" auront à cœur de découvrir les deux derniers, toujours signés Uchida (CNP Terreaux, 14h30 et 17h00).
Les amateurs d’un cinéma plus serein iront voir, au Cinéma Opéra, à14h30, Trains étroitement surveillés de Jiri Menzel (1966), un ami des premiers jours de la revue. C’est avec ce film que Jeune Cinéma a commencé à s’intéresser à lui (en novembre 1967, JC n°26) et n’a plus cessé depuis.
Ceux qui ne savent pas que Sergio Sollima est un cinéaste aussi intéressant que les autres Sergio, Corbucci et Leone, se doivent d’aller découvrir Colorado (Pathé Cordeliers, 17h15).
Enfin les curieux de raretés ne peuvent pas rater L’Indésirable, de Michael Curtiz, un incunable muet (1914), du temps où le futur réalisateur de Casablanca signait encore Mihaly Kertesz.
Mais, comme d’habitude, c’est à l’Institut que l’on dégustera les meilleurs morceaux :
* À 9h30 : Avant de t’aimer de Ida Lupino (1949).
C’est le film qui décida de sa carrière de réalisatrice, puisqu’elle remplaça Elmer Clifton, mort au début du tournage. Une fille-mère dans un scénario hollywoodien, les temps étaient en train de changer.
* À 16h45 : L’Entraîneuse, premier film de Albert Valentin (1938), cinéaste que l’on aime particulièrement ici (cf. JC n° 198).
* À 19h00 : Mon amour ne mourra jamais de Mario Caserini (1913), qui illustre parfaitement l’intitulé de la série "Sublimes moments du muet". Un mélodrame superbe, avec Lyda Borelli, une des dive les plus célèbres du temps.
* À 21h00 : El extraño viaje de Fernando Fernan Gomez (1964), dont on ne sait rien, sinon qu’il fait partie des films de cœur de Pedro Almodovar et que c’est suffisant pour rester dans la salle.
Pierre Barbin (1926-2014) est mort le 5 octobre 2014.
Dans Le Monde d’hier, daté du 15 octobre 2014, une petite annonce discrète, celle de la mort de Pierre Barbin, le 5 octobre 2014, avec des obsèques ayant eu lieu dans l’intimité.
Qui sait encore aujourd’hui qui était Pierre Barbin ?
Sans doute très peu de ceux qui, englués dans la foule solitaire et aveugle, l’ont lynché autrefois.
Vae Victis !
Lyon Lumière 2014
Aujourd’hui, on pourrait courir à travers la ville, aller au CNP Terreaux, par exemple, pour déguster les quatre premiers volets de la saga Musashi Miyamoto, de Tomu Uchida (de 14h15 à 21h30), spectacle garanti.
Ou passer par le Pathé Bellecour (17h00), vérifier si Au grand balcon de Henri Decoin (1949) a conservé toute sa saveur - ah, l’Aéropostale !
On peut également camper, au pied du Château, dans la grande salle de l’Institut, qui offre une série sans faille, et cela jusqu’à la nuit.
Dans l’ordre :
* À 9h45 : Never Fear de Ida Lupino (1951).
Axiome : ne jamais rater un film qu’elle a réalisé ou dans lequel elle apparaît.
* À 11h30 : Une master-class de Bertrand Tavernier, en prélude au documentaire sur le cinéma français qu’il termine et dont on se pourlèche déjà.
* À 14h00 : Le Diable souffle de Edmond T. Gréville (1947), une rareté qui rassemble toutes les obsessions d’un cinéaste à qui Jeune Cinéma a consacré bien des pages.
* À 16h15 : Les Bons Débarras de Francis Mankiewicz (1979), trop peu connu mais remarquable (cf. JC n° 171).
* À 18h30 : Berlin, Symphonie d’une grande ville de Walther Ruttmann (1927), dont on ne se lasse pas - même si l’accompagnement musical nous semble à chaque fois inutile, contrariant la propre mélodie visuelle du film.
* À 20h15 : Arrebato de Ivan Zulueta (1980), dont on ne sait rien mais où l’on ira en confiance.
Et si ce film annoncé "culte" ne convainc pas, on peut vite traverser le jardin Lumière, direction la petite salle de l’Institut, pour Django, Trinita et les autres, documentaire de Jean-François Giré, l’homme qui sait tout et le reste sur le western italien.
Demain est un autre jour.
Aujourd’hui, pour le programme de ce soir, ça dépend si vous êtes à Paris, ou à Lyon, ou à Toulouse.
À Toulouse
Les Toulousains, ils n’ont qu’une seule évidence. Tarkovski et les autres poètes du cinéma soviétique, à la Cinémathèque.
Les "autres" sont Paradjanov, Pelechian et Dovjenko.
À Paris
Les Parisiens, eux, ont toujours et l’embarras du choix et la contrainte du temps de transport. La plupart ont perdu leurs cinémas de quartier, alors qu’il est parfois si doux, surtout en semaine, de rester dans son village.
On veut vous parler d’une initiative qui nous est chère : CinéCaro
Ça se passe sur le plateau du Carreau du Temple, au cœur de Paris.
D’abord, c’est l’occasion d’aller voir ce qu’est - enfin - devenu le vieux Carreau, rénové et ouvert au début de cette année 2014.
C’est pas si souvent que les "monuments" deviennent "historiques", que les arts remplacent les usines à fringues, que les humains remplacent les chaînes. À notre époque, c’est plutôt l’inverse. Et on a toujours mal aux Halles, chaque fois qu’on y pense.
Dans ce lieu juste et beau, une petite association est née, qui prend soin de ses voisins, CinéCaro.
Les habitants du 3e arrondisement se sont mobilisés pour perpétuer ces vieilles pratiques de ciné-club, qui on fait leurs preuves sur tous les fronts (santé morale, pratique démocratique, éducation populaire, solidarité de proximité, plaisir tout simplement, toutes ces sortes de choses qu’on pourrait remettre à la mode).
Ça commence ce soir, mardi 14 octobre 2014, à 19h30, par un hommage à Bernadette Lafont qui nous a quittés en juillet 2013. Elle était la présidente d’honneur de CinéCaro. Le choix s’imposait : La Fiancée du pirate de Nelly Kaplan (1969). Avec le traditionnel débat en sa présence.
Et puis pour les Lyonnais...
Lyon Lumière 2014
Il fallait se lever de bonne heure, ce matin : Rater Paradis perdu de Abel Gance (1940), à 9h30, dans le grande salle de l’Institut Lumière, c’est proche du péché mortel.
De tous les films du Maître, c’est le seul qui puisse être vu et revu sans crainte : l’émotion est toujours là, intacte, et la chanson, Le Paradis perdu,, de Roger Fernay (l’auteur de Youkali, cf. JC 361-362) et Hans May n’a pas pris une ride. Les grands mélos français ne sont pas légion, il ne faut pas laisser passer l’occasion.
Avec Lumière 2014, le problème, c’est l’absence, chez nous autres pauvres mortels coincés dans l’espace et le temps, de ce don divin de l’ubiquité.
Cela contraint, après avoir revu le début de Réveil dans la terreur de Ted Kotcheff (1971, au Comœdia à 16h45), ce film qui, pour la première fois, nous avait donné une autre idée, cauchemardesque, de l’Australie rêvée, à courir (ou plus calmement à choisir) entre le Pathé Bellecour, où est programmé, à 17h15, Ménilmontant de Kirsanoff, et l’Institut, où Le Voyeur de Michael Powell commence à 17h45 (petite salle).
Deux chefs-d’œuvre dans la foulée, toujours intacts eux aussi, du pavé gras de Paris 1926 au Londres glauque de 1960.
Les fans de flamenco verront avec plaisir, au Pathé Bellecour, à 21h30 Embrujo de Carlos Serrano (1948) avec les stars du genre de l’époque.
Et si l’on aime les westerns italiens de grande cuvée, El Chuncho de Damiano Damiani (1966) s’impose (Institut, 21h45).
On ira jusqu’à dire que Gian Maria Volontè y est encore plus impressionnant que chez Sergio Leone, que Lou Castel est passé sans faillir du rôle de rebelle des Poings dans les poches à celui de dandy révolutionnaire, et que Quien sabe ? (en VO) est le western le plus politiquement réjouissant de ces belles années.
What a day !
D’ores et déjà, "save the date", le 11 décembre 2014 pour fêter l’anniversaire de Jeune Cinéma au Forum des images, à Paris.
Lyon Lumière 2014
Certes, il y a la légende Faye Dunaway ce soir, in person, à la Halle Tony Garnier, pour accompagner la projection de Bonnie and Clyde, le film de Arthur Penn qui en fit une star (ce qui ne surprit pas les spectateurs - à vrai dire peu nombreux - de The Happening de Elliot Silverstein, en français Les Détraqués, sorti, en VF, à Paris au cœur de l’été 1967, six mois avant Bonnie).
Mais a-t-on toujours envie de confronter la légende et la réalité ?
En tout cas, le film demeure le bijou noir de la filmographie de Penn.
Le festival a de toute façon commencé ce matin, avec, dans la grande salle de l’Institut Lumière, un Gilles Grangier de derrière les fagots, Le Désordre et la Nuit (1958).
Porteur, sa longue carrière durant, d’une réputation de tâcheron auprès de la critique pensante, le réalisateur connaît toujours le purgatoire, sinon l’oubli.
Un oubli que méritent certains de ses films, soyons justes, mais tous ceux qui ont vu Gas-oil (1955), Le Sang à la tête (1956) et ce Désordre savent que Gilles Grangier était capable du meilleur. Bertrand Tavernier le sait, qui l’a choisi dans son programme de la "seconde chance" pour quelques cinéastes français - on y reviendra.
Surtout, comment résister, juste avant l’heure apéritive (17h15, Institut Lumière, salle 2), à l’appel de La Femme aux cigarettes (Road House) que Jean Negulesco tourna en 1948 ?
Plus que chez Raoul Walsh, Michael Curtiz, Robert Aldrich... Ida Lupino frôle ici l’excellence, dans son rôle de chanteuse fatale, coincée entre le bon et le méchant, entre Cornel Wilde et Richard Widmark.
Nous sommes dans le royaume des archétypes noirs - profitons-en sans compter.
* À 0h00 : Top départ, c’est parti pour le Festival Lumière, à Lyon.
Un programme étourdissant, pendant toute la semaine.
Ce soir, Bonnie and Clyde de Arthur Penn (1967), dans une copie restaurée par Warner, en présence de Faye Dunaway, devant les 5000 spectateurs de la Halle Tony Garnier,
Daniel S., notre sentinelle en état de veille permanente, nous signale le cas de Jayalalithaa Jayaram.
Connaissez-vous Jayalalithaa Jayaram (plus connue sous le simple nom de Jayalalithaa) ?
C’est une ancienne vedette des studios de Madras, aujourd’hui Chennai (capitale de l’État indien du Tamil Nadu).
Une actrice célèbre et reconnue, née en 1948, avec, au compteur, 140 films en langues tamoul ou telougou, et un certain nombre de triomphes populaires.
Et même quelques médailles attribuées par la critique indienne.
Et même un film pré-sélectionné pour les Oscars.
À l’époque, elle est fraiche, coquine même.
En 1982 - elle n’a que 34 ans -, elle abandonne l’écran pour rejoindre un parti centriste, fondé par un autre acteur, un collègue doté d’une popularité extraordinaire, Ramchandran (1907-1987).
Reconvertie dans la politique, elle confirme son évident talent : une langue bien pendue (elle parle six langues locales plus l’anglais), et un grand appétit pour "la gloire".
Elle devient, en 1991, la première femme "ministre en chef" du Tamil Nadu, autrement dit, chef du gouvernement de l’État tamoul.
Et cela, par trois fois : 1991-1996 ; 2001-2006 ; 2011-2014.
En effet, dans cette carrière menée de main de maitresse, elle connaît pourtant quelques revers et quelques déboires. Par exemple, en 2001, elle est condamnée pour détournement des biens d’une agence gouvernementale. Et puis, elle a quelques défaites électorales.
Mais elle retombe toujours sur ses pattes et retourne au charbon vaillamment, là où est le vrai pouvoir, là où on l’appelle "Puratchi Thalaivi" ("leader révolutionnaire").
Forcément, elle a changé, du moins physiquement. Moins fraiche.
Toujours aussi coquine ?
En fait, c’est une pipole, comme on dirait dans nos régions, une habituée des talk show indiens, comme par exemple le très célèbre "Koffee with Karan" sur la chaîne Star World India.
Bref, fin septembre 2014, après dix-huit ans de procédures et de poursuites successives pour corruption et fraude fiscale, Jayalalithaa est, finalement, condamnée, à 4 ans de prison ferme.
Depuis Ronald Reagan, on sait que les métiers d’acteurs et de politiciens sont très proches, requérant de plus en plus souvent les mêmes qualités. Cela s’est confirmé avec le spectacle permanent du sarkoberlusconisme pour la version contemporaine et européenne. Avec Jayalalithaa, nous avons la preuve qu’il existe de jolies passerelles entre ces deux métiers, où que ce soit dans le monde : bateleurs comme au tarot, ou joueur de bonneteau comme dans la vraie vie.
La morale (et le droit) gagnent de temps en temps. Temporairement.
On reparlera sûrement de Jayalalithaa dans quatre ans.
On parie ?
Annecy italien 2014
Au Nemours, une matinée chargée :
* À 10h00 : Présentation du numéro anniversaire de Jeune Cinéma (avec Lucien Logette et Bernard Nave).
* À 11h00 : Rencontre avec Valeria Golino.
Et puis, avec "Millionaire Blonde", à Venise cette année, ciao Annecy 2014, et à l’année prochaine !
Annecy italien 2014
Spéciale dernière : Le Grand Prix du festival d’Annecy a été attribué à la comédie La mafia uccide solo d’estate de Pierfrancesco Diliberto (2013, 90 mn)
Pierfrancesco Diliberto, animateur de télé, auteur et acteur né en 1972, tout le monde le connaît en Italie sous le sobriquet de Pif. Il a reçu son Prix sous les ovations.
Ce soir, à 20.00, c’est le palmarès, puis la projection du film de Paolo Virzi, Il capitale umano.
En attendant, juste pour vous alerter : Il giovane favoloso de Mario Martone (2014) sur Leopardi, présenté hier soir à Annecy, est magnifique.
Leopardi, en France, il est au programme des études d’italien.
Mais non seulement on connaît mal les poètes, mais pour ce qui concerne les poètes étrangers, c’est pire. Quant à Martone, lui aussi, il est méconnu.
C’est sur ces terres de découvertes que Jeune Cinéma se sent le plus à l’aise.
La semaine télé de Jeune Cinéma du 11 au 17 octobre 2014.
Annecy italien 2014
* À 19h30 : I nostri ragazzi de Ivano De Matteo (2014).
Ivano De Matteo est le lauréat, cette année du Prix Sergio Leone.
Son film La bella gente, avait constitué la grande découverte des Rencontres d’Annecy de 2009 (et un Grand Prix incontesté).
L’arrivée dans une famille d’intellectuels de gauche d’une prostituée venue de l’Est, arrachée à son "protecteur" et recueillie comme quelqu’un de la famille, allait bien au-delà des événements décrits. L’ambiguïté des relations, la bien-pensance confrontée à la réalité des rapports de classe, les atermoiements de la bonne conscience faisaient de ce film une fable très dérangeante - tellement qu’il dut attendre plusieurs années pour trouver un distributeur en Italie.
On attendait Ivano De Matteo au tournant du film suivant, Gli equilibristi (2012).
Tournant réussi, grâce à un Valerio Mastandrea remarquable en père de famille heureux qui voit son univers s’écrouler brutalement. Séparation, perte des supports matériels, de tout ce qui faisait les repères quotidiens, dégringolade vers la clochardisation, le schéma de la spirale est certes banal, mais toujours étreignant lorqu’il est décrit avec une telle force.
Nous ne connaissons pas ses deux premiers films, Prigionieri si une fede (1999) et Ultimo stadio (2002). Mais avec les deux films suivants, Ivano De Matteo (né en 1966) s’est affirmé comme un des cinéastes les plus intéressants de cette génération venue en cinéma depuis le début du siècle. Après Daniele Vicari et Roberto Ando, il s’inscrit sans déparer dans la lignée des récents prix Sergio-Leone.
* À 21h30 : Il giovane favoloso (sur le poète Leopardi) de Mario Martone.
Mario Martone est un réalisateur bien connu de Jeune Cinéma.
La revue a traité de son premier film Morte di un matematico napoletano (Mort d’un mathématicien napolitain (1992) dans JC n°222 ; L’amore molesto (L’Amour meurtri) (1995) dans JC n°235 ; La salita (un des 5 épisodes du film à sketches I vesuviani dans JC n° 245 ; Teatro di guerra (1998) dans JC n°250 et 254 ; Una disperata vitalità (documentaire, 1999), dans JC n°260.
Prix Nobel de littérature 2014 à Patrick Modiano.
Il est très étonné. Il dit : "Ça fait 45 ans que j’écris le même livre, alors j’aimerais qu’ils m’expliquent leurs critères".
Il est très sympathique, Modiano, notamment par ses hésitations de paroles, une façon de refuser d’appartenir à cette culture orale qui gagne nos contrées, et de se tenir obstinément dans le monde de la culture écrite.
Quant à sa fréquentation de personnages louches, douteux et duplices qu’il anime, elle demeure inattaquable, dans ses récits ouatés et brumeux.
Plongé dans ses livres sans images, chaque lecteur est libre de se fabriquer ses propres visions dans un univers compatible avec ses propres obscurités.
Modiano, c’est extraordinairement attachant.
Au cinéma, c’est autre chose.
Les réalisateurs s’approprient toujours le scénario, d’où qu’il vienne, et fournissent tout le matériel (images, sons, rythmes) clés en main. Le spectateur voit sa marge d’imaginaire considérablement réduite par rapport au lecteur qu’il a pu être.
À ce jour, cinq romans de Patrick Modiano ont été adaptés à l’écran.
En 1983, Une Jeunesse de Moshé Mizrahi (d’après le roman homonyme, 1981) ; en 1995, Le Parfum d’Yvonne de Patrice Leconte (d’après Villa triste, 1975) ; en 2001, Te quiero de Manuel Poirier (d’après Dimanches d’août, 1986).
Il convient d’ajouter : en 2006, le moyen métrage Charell de Mikhael Hers (d’après De si braves garçons, 1982) ; en 2009, le téléfilm Des gens qui passent de Alain Nahum (d’après Un cirque qui passe, 1992).
Patrick Modiano a, par ailleurs, écrit quatre scénarios originaux :
* En 1974, Lacombe Lucien avec Louis Malle.
* En 1975, Un innocent, pour Nadine Trintignant, épisode de la série Madame la juge avec Simone Signoret.
* En 1995, Le Fils de Gascogne avec Pascal Aubier.
* En 2003, Bon Voyage avec Jean-Paul Rappeneau.
Aucun de ses scénarios, aucune de ses adaptations n’a provoqué, une telle polémique, ni inspiré tant de thèses que Lacombe Lucien, en 1974.
Louis Malle eut beau se défendre en disant avoir voulu faire une description "marxiste" du lumpenprolétariat, ce fut sanglant en France, où trente ans après, les blessures n’étaient pas cicatrisées. Le film, en revanche, n’a gêné ni les Anglais (Meilleur film de l’année aux BAFTA Awards), ni les Américains (film nommé aux Oscars du meilleur film étranger).
Jean Delmas, résistant de la première heure, avait été scandalisé, par Lacombe Lucien. Et il n’y était pas allé de main morte.
Annecy italien 2014
* À 19h30 : Soto una buona stella (Sous une bonne étoile) de Carlo Verdone (2014).
* À 21h30 : L’intripido de Gianni Amelio (2012).
Gianni Amelio est un autre favori de Jeune Cinéma, qui le suit depuis ses deux premiers film, La fine del gioco (pour la télé, 1970) et La città del sole (1973), dans JC n°84.
Jeune Cinéma a parlé ensuite de La morte al lavoro (La mort au travail) (1978) dans JC n°115 ; Il piccolo Archimede (1979) dans JC n°129 ; Colpire al cuore (1982) dans JC n°146 ; Portes ouvertes (1990) dans JC n°202 ; Il ladro di bambini (1992) dans JC n°216 ; Lamerica (1994) dans JC n°230 ; Mon frère (1998) dans JC n°253 ; La stella che non c’é (L’Étoile imaginaire) (2006).
JC a publié aussi régulièrement des entretiens avec Gianni Amelio, dont le dernier avec Andrée Tournès et Tadeusz Sobolovski, à propos de Les Clefs de la maison (Le chiavi di casa) (2004).
À Annecy, on peut aussi choisir d’aller voir aux mêmes heures :
* À 19h00 : Corpo a corpo de Mario Brenta & Karine de Villers (2013).
* À 21h30 : Amore carne de Pippo Delbono (2011).
Annecy italien 2014
Ce soir, à 19.30 : ouverture officielle du festival Annecy Italien avec La sedia de la felicità (2013), le dernier film de Carlo Mazzacurati (1956-2014).
Carlo Mazzacurati est le chouchou de Jeune Cinéma. La revue s’est intéressée à lui dès son deuxième film, Notte italiana (Nuit italienne) (1988) dans JC n°185 et 186.
Ont suivi : Il toro (1994) dans JC n°231 ; Un’Altra vita (1997) dans JC n°242 ; Vesna va veloce (1997) dans JC n° 242 ; Ritratti : Maria Rigoni Stern (1999), dans JC n°260 ; La lingua del santo (2000) dans JC n°264 ; L’amore ritrovato (Une romance italienne) en 2004, dans JC n°294 ; La passione (2010) dans JC n°336-337.
Andrée Tournès l’avait rencontré en 2002, pour un long entretien (JC n°275).
* À 19h00 : au Nemours, dans le cadre de l’hommage à Valeria Golino, il faut aussi aller voir Miele .
Embarras du choix, éternel rêve d’ubiquité.
Cette semaine, au ciné, sur les grands écrans, deux tentations :
* Heritage Fight de Eugénie Dumont (2012).
* Et la réédition de l’inoxydable Blue Collar de Paul Schrader (1978).
Le Jeune Cinéma nouveau est arrivé !
Un numéro historique, celui de son demi-siècle.
Dans son édito, Lucien Logette écrit :
Comment saluer ce cinquantenaire ?
Les vingt meilleurs films depuis 1964, choisis par les collaborateurs ? Jamais la revue ne s’étant livrée au petit jeu du palmarès annuel, décennal ou autre, il était un peu tard pour commencer un tel exercice sans intérêt et soumis aux fluctuations des données saisonnières (il suffit de vérifier l’évolution des Top Ten au cours des années). Jamais Jeune Cinéma n’a joué les pions, décernant des notes ou des étoiles aux œuvres méritantes. Donc, plutôt que tresser des lauriers inutiles, peu ébouriffante surprise, nous avons préféré offrir aux rédacteurs, anciens ou nouveaux, une carte blanche sur la base : quel film des cent dernières années aimeriez-vous sortir de l’ombre ? Si possible, un titre dans la manière de la revue, plus attentive à scruter les marges et les bas-côtés que les chefs-d’œuvre en cours d’homologation. Les possibilités étaient infinies : un film jamais revu depuis l’enfance et dont on ne s’est jamais vraiment débarrassé, un film comique connu par cœur et dont on n’ose pas avouer l’addiction honteuse qu’il entretient, un film jamais vu - pourquoi pas ? -, mais dont une photo fait rêver, un film "à soi", dont on est assuré qu’il n’a jamais touché aussi vivement personne d’autre que nous, etc. En bref, un hidden gem à la mesure de chacun. Le résultat a été à la hauteur de notre attente, multipliant l’inattendu, le surprenant, l’incongru. Tout à fait ce que l’on espérait de nos équipiers fidèles…
La plupart des auteurs a choisi des films qui, d’une manière ou d’une autrre, avaient été vus et commentés par Jeune Cinéma.
On peut se dire qu’ls sont de la même "famille", ils ont ou auraient pu faire partie de la bande des années fondatrices.
* Pierre Beneyton : Fais-moi très mal… de Dino Risi (1968).
* Gisèle Breteau Skira : La Cicatrice intérieure de Philippe Garrel (1971).
* Maja Brick : O Lucky Man ! de Lindsay Anderson (1973).
* Jean-François Camus : Le Terroriste de Gianfranco De Bosio (1963).
* Gérard Camy : Joe Hill de Bo Widerberg (1971).
* Jacques Chevallier : London / Robinson in Space de Patrick Keiller (1994)
* Nicolas Droin : The Mosquito Coast de Peter Weir (1986).
* Nicole Gabriel : Ménilmontant de Dimitri Kirsanoff (1926).
* Frédéric Gavelle : Our Mother’House (Chaque soir à 9 heures) de Jack Clayton (1967).
* Robert Grélier : La Vieille Dame indigne de René Allio (1965).
* Daniel Guffroy : Quelle heure est-il, M. Réveil ? de Peter Bacso (1985).
* Laetitia Kulyk : Œdipe-roi de Pier Paolo Pasolini (1967).
* Lucien Logette : Who’s Crazy ? de Allan Zion & Tom White (1965).
* Bernard Nave : Hallelujah the Hills de Adolfas Mekas (1963).
* Philippe Roger : Les Enfants du placard de Benoît Jacquot (1977).
* Philippe Rousseau : La Lumière des étoiles mortes de Charles Matton (1994).
* Daniel Sauvaget : La mort est mon métier de Theodor Kotulla (1983).
* Anne Vignaux-Laurent : La villegiatura de Marco Leto (1973)
Les autres collaborateurs ont choisi des films sans racines dans la revue.
* Patrice Allain : Blondine de Henri Mahé (1943).
* Julien Camy : Jetons les livres et sortons dans la rue de Shuji Terayama (1971).
* Vincent Dupré : The Spirit of St-Louis de Billy Wilder (1957).
* Jérôme Fabre : La Grande Vadrouille de Gérard Oury (1966).
* Prosper Hillairet : The Big Shave (cm) de Martin Scorsese (1965).
* Sandra Marti : Mary Poppins de Robert Stevenson (1964).
* Jean-Max Méjean : The Window de Ted Tetziaff (1949).
* Jean-Pierre Pagliano : Une fille dans la montagne de Roger Leenhardt (1964).
* Jacques Pelinq : North to Alaska de Henry Hathaway (1960).
* Philippe Piazzo : Cinq tulipes rouges de Jean Stelli (1948).
* Patrick Saffar : Smörgasbord (T’es fou Jerry) de Jerry Lewis (1983).
Ils ont rejoint la revue plus tard.
À l’exception notable de René Prédal, qui a choisi Le Cauchemar de Dracula de Terence Fischer (1958), et, lui, il était à l’origine de la revue. Le fin du fin.
Tiens, au fait, c’est vrai, pourquoi la revue Jeune Cinéma n’a-t-elle jamais parlé de Dracula, de Terence Fisher ou de Christopher Lee ?
Les raisons pour lesquelles Jeune Cinéma n’a pas traité certains films ou certains auteurs sont diverses.
Née en 1964, elle a pris le train en marche. Sa naissance a correspondu aussi à une période avec des urgences politiques.
Elle avait sans doute aussi une certaine idée du cinéma "populaire" que nous, aujourd’hui, devons scruter et peaufiner.
Mais nos auteurs "sans racines", ils nous disent que la revue avait besoin de leurs regards autres.
La revue Jeune Cinéma entame donc sa cinquante-et-unième année.
Nous lui souhaitons les vents les plus favorables pour son chemin vers Ithaque !
Demain, en librairie, on trouvera les Conversations avec Claude Sautet de Michel Boujut. Édition définitive et soignée : préfaces de Daniel Auteuil et Thierry Frémaux, postface de Bertrand Tavernier.
Le livre était épuisé depuis 2001, il est donc relooké de neuf à l’occasion de la rétrospective des films de Claude Sautet restaurés au Festival Lumière à Lyon (du 13 au 19 octobre 2014).
Tous les projecteurs vont se tourner vers Claude Sautet.
Nous, on pense à Michel Boujut.
Il nous manque, Boujut, "Boujut sauvé des eaux" comme le surnommait Gérard Legrand, lui et son univers peuplé de déserteurs militants, de jazzmen et de cinémas, son "surréalisme" perso, son "dylanianisme" soigné, ses sourires pince-sans-rire.
On aimait faire les manifs avec lui.
Souvenons-nous de ses petits livres délicieux :
La Promenade du critique.
Ou son dernier : Le jour où Gary Cooper est mort.
C’est après-demain, mercredi, que commence, à Auch, le 17e festival Indépendance (s) et création (du 8 au 12 octobre 2014).
Pour les nuls en géographie : Auch est un des hauts lieux du pays gascon. C’est pas très loin de Bordeaux, à côté d’Agen, et en liaison permanente avec la cinémathèque de Toulouse.
Pour les Parisiens, le trajet en train n’est pas très commode, mais en avion, c’est super facile.
À Auch, donc, ils ont eu la riche idée de faire un festival d’avant-premières, unique en son genre. En présence des équipes des films, le public peut découvrir le meilleur de ce qui sera demain dans les salles, et dialoguer avec les auteurs et les acteurs.
À l’origine : Alain Bouffartigue, animateur du ciné-club de son lycée en 1967, créateur de Ciné 32, en 1978, inventeur de Indépendance (s) et création en 1998.
Malgré les grands bouleversements des temps, il fait partie des rares "cinéphiles" qui ont persévéré dans le même sillon, avec ces bonnes vieilles idées de la bonne vieille "décentralisation", qui essaimaient derrière Jean Vilar (pour le théâtre), dans les années 50 et 60. Jeune Cinéma est de la même bande.
Ces idées, elles avaient fait fait leurs preuves, et n’ont jamais été remplacées par rien. Les infos et les pubs de la télé ne font pas le poids.
Aujourd’hui, Alain Bouffartigue est à la tête d’un festival "de proximité" (selon ses propres termes), mais qui irradie de toute part, en boostant les cinéphiles de demain.
En 2014, le programme est étourdissant (51 films en avant-première).
C’est l’occasion de découvrir les nouveaux films de Cédric Kahn, François Ozon, Laurent Cantet, Marjane Satrapi, ou encore Yoji Yamada, Wang Bing, Diego Lerman, parmi tant d’autres. Et de voir, avant tout le monde, ces grands films sélectionnés aux festivals de Cannes, Venise, Dinard… ou injustement oubliés dans les sélections.
C’est simple, on vous les recommande tous.
Mais plus particulièrement, par exemple, Les Merveilles de Alice Rohrwacher, ou Foxcatcher de Bennett Miller, Mr Turner de Mike Leigh ou Les Nuits d’été de Mario Fanfani, Hope de Boris Lojkine ou La Rançon de la gloire de Xavier Beauvois.
Avec un petit zoom sur White God de Kornel Mundruczo, un film sur lequel on a des doutes.
PS : Par ailleurs, à Auch, comme chaque année, ce week-end dernier, s’est tenue la Véloccas’Auch, une des plus importantes bourses de vélos d’occasion et de pièces détachées de France et de Navarre. Mais ce n’est qu’un avis aux amateurs, et un RV pour l’an prochain.
Le sida, de nouveau sous les projos.
Ces dernières années, on en reparle de temps en temps. Les malades survivent longtemps désormais, en Occident au moins. C’est le principal, hein.
Pour nous, ce n’est plus cette grande affaire des années 80 qui a bouleversé nos vies, nos mœurs, nos corps et nos cœurs.
"Ils ne mouraient pas tous, mais tous étaient atteints", murmurait Jacques, gisant sur son dernier lit. Denis, lui, s’était retiré du monde avant de trouver une euthanasie convenable. Et les filles, et les enfants, y venaient à leur tour.
Les crémations se succédaient au Père Lachaise, essuyant les plâtres de nouveaux rituels.
Nous nous souvenons de la petite boîte de cigarillos, posée délicatement sur les marches de la Coupole, aux obsèques de Bernard Dort, en 1994. Moins apaisante, la petite boîte, que les orgues de celles de Guy Hocquenghem à Notre-Dame des Champs en 1988. Mais annonçant mieux l’avenir qui se dessinait.
36 millions de morts.
On a oublié la panique et l’hécatombe. Et la longue théorie de nos deuils.
Le cinéma lui-même a cessé d’en faire un sujet de films.
Les chercheurs, eux, n’ont pas lâché l’affaire.
Ils viennent, 30 ans après, de trouver la vraie origine du rétrovirus VIH.
Il venait, en effet, de quelque singe (vert ou pas), et est apparu à Kinshasa, dans les années 20, puis s’’est propagé avec le développement du chemin de fer.
On rêve un instant à cette évidence négligée : les épidémies propagées par les moyens de communication. Épidémies physiques, mais épidémies mentales aussi.
Quelles maladies mentales ont-elles été propagées par l’avancée du chemin de fer vers l’Ouest américain, vous savez celui de Iron Horse (Le cheval de fer) de John Ford (1924).
Ou celui de Denver and Rio Grande (Les Rivaux du rail) de Byron Haskin (1952), avec Lucky Luke en guest star postérieure, en 1955 puis en 1961.
Ou bien, plus près de nous, celui de Il était une fois dans l’Ouest de nos regrettés Leone and Morricone ?
On connaît les ravages physiques sur les Indiens, l’acoolisme notamment. Mais les autres semblent encore mal identifiées.
Quelles maladies mentales sont-elles en train d’avancer souterrainement via Internet ?
On les souçonne, mais il faudra peut-être aussi 30 ans pour les identifier, une fois que le mal aura été bien fait et clairement repéré.
Ainsi vont les rythmes de la politique, le court terme local et électoral plutôt que le devenir de l’humanité.
Après moi, le déluge, on n’a qu’une vie que diable.
Et les enfants, on en veut, on en veut, par tous les moyens, bien à soi, et pas ceux qui sont déjà faits. Mais c’est pour la bonne cause : la chair à canon.
Et les politiques : compréhension et intervention, bien sûr. Mais plutôt après la catastrophe qu’avant.
D’ailleurs, la "Terre", c’est encore si vaste, pour les tout petits dirigeants.
Dans leurs champ de vision, même les guerres mondiales à venir ont encore les mêmes angles morts qu’en 14 ou en 40.
Vieille dispute entre les sciences dures et les sciences molles. Ce qui est assuré, c’est que l’économie n’est en aucune façon une science exacte au dessus de la mêlée, et qu’elle est aisément asservie par les dominants.
Ainsi rendus sur le territoire économique, nous ne nous éloignons pas tant que ça du sida, comme emblème des injustices.
Il suffit de comparer, encore aujourd’hui, les chiffres africains et les chiffres occidentaux. Et de transposer vers Ebola.
La semaine télé de Jeune Cinéma du 4 au 10 octobre 2014.
Rétrospective Phil Karlson (1908-1985) à la Cinémathèque de Bercy jusqu’au 22 novembre 2014.
Alors là ! Comment dire ?
Pour nous, c’est quelque chose comme le saint des saints.
Ou alors, le noyau dur, voire le "déchet ultime" de nos cultures intimes.
Il fut un temps où les polars étaient clandos.
Ils avaient droit au 3e rayon, derrière même les érotiques.
Ils étaient le repos du guerrier caché des intellectuels fatigués ou, en magazines, le divertissement méprisé des prolos également fatigués (ceux qui aimaient lire).
Le monde d’alors se divisait en deux : ceux des deux catégories précédentes, regroupés, qui se délectaient des couvertures jaunes du Masque et de celles des Séries blème et noire.
Et les autres, légèrement hautains, qui "préféraient Proust, Tosltoï ou Joyce".
Comme si c’était pas compatible. Sans compter que Proust, comme polardeux…, mais on s’égare.
Et puis - la croissance de la démographie (donc, pense-t-on, de la démocratie) étant à la manœuvre -, le bas a poussé vers le haut, et le derrière est passé sur le devant de la scène.
Et le polar triompha.
Venant du fait divers, et passant par la case "social", il fut promu au rang de littérature politique.
Pour nous autres, très old fashion, le polar a toujours été plus que la littérature distrayante, ou sociale, ou même politique. Évidemment, nous avions nos classiques, Goodis, Chandler, Hammett. Mais nous ne crachions pas sur Maman déteste la police, ou sur L’Héroïne de Vientiane, dans des collections plus marginales, ni sur les caricatures.
C’était un territoire archi-personnel, une structuration progressive de nos pensées et de nos vécus : celui de l’enquête, de la recherche, du mystère sans élucidation finale. Une vision du monde, une méthode d’existence.
Pour en revenir à Phil Karlson (61 films de 1944 à 1975), il est l’auteur - si, si "l’auteur" - de ces polars emblématiques qui nous ont formés dans les Cinéac des villes (où il n’y avait pas que des actualités).
Tout, chez lui, nous fait bicher : son noir et blanc ravalé, la construction de ses récits, ses gros plans, ses profondeurs de champ, ses villes, ses vrais mecs machos et losers, ses vamps middle class.
Courez à la cinémathèque de Bercy.
Et si par hasard vous ratez, sur grand écran, Kansas City Confidential (Le Quatrième Homme) (1952), vous pouvez le voir chez vous, for free.
Depuis hier, tous les érudits maniaques et autres complétistes allumés - bref tous les aficionados de Armel De Lorme - peuvent se procurer le volume 12 de l’Encyclopédie des longs métrages français, 1929-1979.
On préfère vous prévenir : on ne la trouve absolument nulle part.
Sauf quand on se branche directement.
Il y a, là, tous les éléments d’une contre-histoire du cinéma, si souvent rêvée et tentée, mais là, quasi-accomplie.
Ce 12e tome se place "sous le haut patronage des grands films méconnus, du Dernier Tournant (Pierre Chenal, 1939) à Des gens sans importance (Henri Verneuil, 1955), en passant par Les Dernières Vacances (Roger Leenhardt, 1947)".
On y fait la part belle à Sacha Guitry (Désiré, 1937 ; Le Destin fabuleux de Désirée Clary, 1941), Jean-Pierre Melville (Deux Hommes dans Manhattan, 1958 ; Le Deuxième Souffle, 1966), Jean-Luc Godard (2 ou 3 Choses que je sais d’elle, 1966), François Truffaut (Deux Anglaises et le Continent, 1971), Valerio Zurlini (Le Désert des Tartares, 1976).
Mais il y est également question de Maurice Tourneur (Les Deux Orphelines, 1932) et d’Yves Mirande (Derrière la façade, 1939), de Jeff Musso (Dernière Jeunesse, 1939) ou de Jess Franco (Des frissons sous la peau, 1973).
Ce soir à 20h30, au Centre Wallonie-Bruxelles, c’est l’ouverture du Festival francophonie métissée, avec un riche programme.
Cette année, le Sénégal est à l’honneur, au CWB.
Le film d’ouverture, c’est Timbuktu d’Abderrahmane Sissako, en avant-première (il ne sortira sur les autres écrans qu’en décembre 2014).
Le film a été sélectionné à Toronto et à Sydney.
À Cannes en compétition officielle du festival de Cannes 2014, il nous avait épatés. (cf. Journal de Ma’ Joad, le 14 mai 2014). Il méritait un prix, ce fut la seule faiblesse du palmarès du jury Jane-Campion.
Elina Labourdette (1919-2014) est morte, le 30 septembre 2014.
C’est la dernière participante des Dames du bois de Boulogne qui disparaît. Elle restera assurément dans les histoires du cinéma pour son rôle d’Agnès chez Bresson, à l’époque où celui-ci faisait encore appel à des acteurs.
Ce rôle aurait dû lui en ouvrir d’autres, aussi importants, mais il demeure un des seuls où elle put occuper la place qu’elle méritait. Car durant les années 50, sa décennie la plus productive, son nom n’apparut dans les génériques qu’après le titre, jamais avant.
Dans Le Château de verre de René Clément (1950), la vedette, c’est Michèle Morgan ; dans Édouard et Caroline (Jacques Becker, 1951), c’est Anne Vernon ; dans Mon mari est merveilleux (André Hunebelle, 1953), c’est Sophie Desmarest ; dans Papa, maman, ma femme et moi (Jean-Paul Le Chanois, 1956), c’est Nicole Courcel ; dans Elena et les hommes (Jean Renoir, 1956), c’est Ingrid Bergman ; dans Lola (Jacques Demy, 1961), c’est Anouk Aimée.
Elle se résigna à être une interprète de "seconds rôles", grandes bourgeoises chez Becker, ou comtesses, chez Henri Diamant-Berger, Monsieur Fabre (1951) ; chez Muriel Box, The Truth About Women (1957) ; chez Jean-Pierre Mocky, Snobs !, (1962). Son élégance naturelle s’y exerçait brillamment.
On ne choisit pas toujours ses réalisateurs, et outre les grands déjà cités, auxquels on ajoutera Carné, Litvak ou Guy Gilles - elle fit son ultime apparition dans Clair de terre, (1970), elle travailla avec des cinéastes moins cotés, tels René Le Hénaff, René Jayet, Willy Rozier, Richard Pottier ou Victor Merenda.
On aimerait voir comment ils utilisèrent la jolie danseuse de Bresson.
Elle avait 95 ans.